Flora Vogesiaca : la flore sauvage du massif des Vosges
On croyait tout savoir sur la flore du massif des Vosges, que les botanistes parcourent de long en large et de haut en bas depuis le 18ème siècle… Mais il reste encore des choses à découvrir et à faire découvrir ! L’aventure avait commencé lors de la réalisation du guide phytosociologique des prairies du massif des Vosges et du Jura alsacien, elle s'est poursuivie avec FLORA VOGESIACA, un programme pluri-annuel visant à améliorer la connaissance de la flore sauvage du massif vosgien et à mobiliser le grand public et notamment ses botanistes, amateurs ou passionnés.
De janvier 2020 à décembre 2022, ce programme, financé par l’Europe dans le cadre de Natura 2000 et par les deux Régions Grand Est et Bourgogne-Franche-Comté, a permis aux trois Conservatoires botaniques – Alsace, Lorraine et Franche-Comté – d’améliorer les connaissances sur la flore sauvage du massif vosgien. Le projet a été piloté par le Parc naturel régional des Ballons des Vosges, en lien avec le Parc naturel régional des Vosges du Nord et les communautés de communes de la vallée de la Bruche et de la vallée de Villé. L’association Alchémille et compagnie s’est vu confier une mission d’ethnobotanique, et l’ONF et un bureau d’études ont également contribué à la formation du public en proposant des sorties phytosociologiques.
Objectifs du projet
Flora vogesiaca s’est donné comme première mission de compléter les données dans les zones sous-prospectées du massif des Vosges. Cette première action a permis de renouveler les données anciennes et d’obtenir ainsi une vision plus homogène de la flore, afin de redéfinir les orientations et les priorités de conservation des espèces les plus menacées dans le domaine vosgien. Un premier travail concernant le périmètre d’étude a d’abord été réalisé, principalement basé sur les données géologiques et géographiques (unités paysagères, régions naturelles), afin de délimiter la dition. Puis une mise à jour de la taxonomie des végétaux étudiés a également été entreprise, avec une estimation des raretés et des menaces pesant sur chacun des taxons. Cette dernière précise le statut actuel de plusieurs espèces considérées comme patrimoniales dans le massif.
Le programme a également permis de faire quelques synthèses concernant des taxons considérés comme vulnérables ou menacés, et dont les données souvent anciennes n’avaient pas été récemment mises à jour. Certains ont fait l’objet d’un bilan au niveau de tout le massif. Les taxons qui ont fait l’objet de recherches particulières sont les suivants : Campanula baumgartenii Becker, Campanula cervicaria L, Campanula latifolia L., Cicuta virosa L., Elatine triandra Schkuhr, Eriophorum gracile Koch ex Roth, Geranium sanguineum L., Hypericum elodes L., Lycopodiella inundata (L.) Holub, Melica ciliata subsp. transsilvanica (Schur) Husn., Nuphar pumila (Timm) DC., Oenanthe fluviatilis (Bab.) Coleman, Orthilia secunda (L.) House, Polystichum lonchitis (L.) Roth, Pyrola media Sw., Saxifraga rosacea Moench, Scheuchzeria palustris L., Scrophularia vernalis L., Sedum villosum L., Stellaria palustris Ehrh. ex Hoffm., Streptopus amplexifolius (L.) DC. et Thesium linophyllon L.
Des inventaires efficaces
Les deux années de prospections sur des mailles de 25 km2 ont permis de remettre à jour les connaissances de 125 mailles. Ces entités ont été choisies en fonction de deux principaux critères : celles comptabilisant moins de 250 taxons mentionnés après 2000, preuve que la maille est mal connue, et celles comptabilisant moins de 250 taxons mentionnés après 2010, signe que les données sont vieillissantes et doivent être actualisées. Le protocole d’inventaire est celui utilisé par les CBN, avec des mailles de 5x5 km, Lambert 93, une indication communale, une géolocalisation du relevé ou des taxons à enjeux (espèces protégées, menacées, rares ou déterminantes ZNIEFF), une bonne diversité des habitats, tout cela réalisé sur une journée complète de prospection.
Les résultats sont probants, les 125 mailles prospectées sont presque toutes passées à plus de 250 taxons. 67 ont dépassé les 350 taxons et 12 renferment plus de 450 taxons. Sur un pas de temps de 22 ans (soit les connaissances comprises entre 2000 et 2022), on constate une forte progression des connaissances sur les mailles méconnues du massif vosgien. Le nombre de mailles prioritaires de moins de 250 taxons mentionnés après 2000 passe de 75 à 25.
Défendre les groupes difficiles
Des clés de détermination
Une seconde mission a consisté à élaborer des clés d'identification adaptées pour quelques taxons réputés difficiles. Afin d’intéresser la communauté naturaliste à des genres tels que les épervières ou les alchémilles, une étude poussée a été entreprise sur ces groupes. Un échantillonnage a ainsi permis de réaliser un herbier de référence, ainsi qu’une photothèque. Aidés par Jean-Marc Tison, l’auteur de Flora gallica, pour les épervières, et par Yorick Ferrez pour les alchémilles, les botanistes en charge de ce projet vont pouvoir élaborer, d’ici la fin du programme, des outils pédagogiques et didactiques pour reconnaître les divers taxons vosgiens. Une clé des saules a également été réalisée, avec une iconographie facilitant la reconnaissance de ces arbres et arbustes.
Clé des Alchemilles (le genre Alchemilla)
Clé des Epervières (le genre Hieracium)
Clé des saules (le genre Salix)
Des plantes et des hommes
Enfin l'usage passé et actuel de la flore sauvage par les habitants du massif reste peu étudié et n'a pas non plus été exploré de manière homogène entre les vallées, les départements et différents secteurs du massif. Un volet d’ethnobotanique a permis d’approfondir les connaissances sur les usages locaux des plantes sauvages spécifiques au massif, qu’ils soient médicinaux, culinaires ou culturels.
Émulation et réseau
Flora vogesiaca a été construite autour d’une décision forte d’animer et de motiver une communauté de botanistes du massif vosgien, professionnels ou amateurs. En effet, si les hauts sommets sont bien suivis par les naturalistes, certaines zones sont délaissées et donc bien moins connues.
L’encouragement aux prospections et l’émulation entre botanistes restent donc des priorités pour les gestionnaires et les scientifiques des espaces naturels rattachés aux parcs naturels régionaux et aux réserves naturelles. Ils le sont également pour les personnels des Conservatoires, leurs coopérations avec les associations de botanistes locales et régionales étant déjà fortement établies.
Enquêtes participatives
Pour accompagner les prospections et aider le grand public à identifier les différentes espèces de l'enquête, des fiches descriptives ont été élaborées au sein d'un livret d'identification avec photos, dessins, présentation de l'espèce et risques de confusion. Les aires de répartition actuelles ou récentes de ces espèces sont également précisées. Les participants sont invités à signaler leurs observations.
Sorties nature & formations
Flora Vogesiaca, c'est aussi des sorties grand public et des formations techniques (réservées aux techniciens et chargés de mission débutants), pour partir à la découverte de la flore commune mais également patrimoniale présente le long de différents parcours, à travers hautes-chaumes, forêts, étangs ou milieux humides.
Quelle est cette fleur ? Comment la reconnaître, quels sont les critères simples pour l’identifier ? Dans quel milieu pousse t’elle ? A quelle famille appartient-elle ?
Ces sorties étaient encadrées par des botanistes professionnels, issus des Conservatoires Botaniques régionaux.
Le programme a également permis de mettre en place plusieurs formations concernant des groupes difficiles ou mal connus, comme les graminées, les cypéracées, les joncacées, les épervières et les alchémilles. D’autres rencontres avaient pour objectif de faire découvrir des habitats particuliers, tels que les types phytosociologiques des prairies et hautes-chaumes et ceux des forêts. Quelques sorties plus grand public ont été organisées autour de thèmes, comme la flore des étangs et tourbières, celle de la région des mille étangs, celle des pelouses d’annuelles de la région de Luxeuil-les-Bains ou celle, basiphile, de la région de Saint-Dié.
En 2022, quelques battues avec des botanistes bénévoles ont été organisées afin de retrouver des plantes remarquables non revues récemment dans certains secteurs : la pyrole moyenne, la fougère à crête et l’épipogon sans feuilles.Enfin, une rencontre avec les botanistes amateurs a été organisée à Munster le 25 juin 2022. Un bilan du programme a été présenté aux participants, et la journée s’est terminée par des sorties sur les sommets des Vosges.
Valorisation de la flore des Vosges
Création de supports visuels
Afin de valoriser le travail mené au cours du projet Flora Vogesiaca et de développer des supports de sensibilisation à destination du grand public, un travail créatif a été mené afin de concevoir une identité graphique dédiée au projet et de décliner plusieurs supports de valorisation de la flore du massif des Vosges : cartes postales, posters et sets de table.
Ces supports sont diffusés par les Parcs naturels régionaux des Ballons des Vosges et des Vosges du Nord, sur l’ensemble du massif des Vosges.
Pilotes et partenaires du projet
FLORA VOGESIACA est animé par le Parc naturel régional des Ballons des Vosges en lien avec le Parc naturel régional des Vosges du Nord, la Communauté de communes de la vallée de la Bruche, la Communauté de communes de la vallée de Villé et les 3 Conservatoires Botaniques de Lorraine, Alsace et Franche Comté.
Ce programme bénéficie du soutien financier de l’Union Européenne (FEDER Massif des Vosges), de l’Etat (crédits Massif des Vosges), des Régions Grand-Est et Bourgogne Franche Comté.
Un projet mené par :