Tetrix bipunctata (L., 1758) et Tetrix kraussi Saulcy, 1889 en France : réparti-tion nationale, biométrie, écologie, statut et sympatrie (Orthoptera : Caelifera, Tetrigoidea, Tetrigidae)
SARDET E., DEHONDT F. et MORA F., 2015. Tetrix bipunctata (L., 1758) et Tetrix kraussi Saulcy, 1889 en France : répartion nationale, biométrie, écologie, statut et sympatrie (Orthoptera : Caelifera, Tetrigoidea, Tetrigidae).
La position taxinomique de Tetrix kraussi Saulcy, 1889 a régulièrement évolué. Il a longtemps été considéré comme une simple forme ou une sous-espèce de Tetrix bipunctata (L., 1758), dont la distinction se base uniquement sur la longueur des ailes. Aujourd’hui, Tetrix kraussi est considéré comme une bonne espèce par la plupart des auteurs, en raison de sa distribution sympatrique avec Tetrix bipunctata. Une synthèse des connaissances est proposée pour la France : distribution (à partir des données contrôlées), écologie et étude morphométrique. À partir de ces résultats, il apparaît que ces deux taxons possèdent une écologie proche et une relative stabilité morphologique à l’exception de quelques individus intermédiaires localisés dans le massif des Alpes. Les deux taxons sont régulièrement trouvés en sympatrie, mais rarement en syntopie, et, dans ce dernier cas, les effectifs sont toujours très déséquilibrés en faveur de Tetrix kraussi. Un mécanisme d’exclusion des deux taxons semble conduire à une ségrégation spatiale. À partir de ce constat, le statut taxinomique est discuté et confronté avec de récents travaux éthologiques sur les Tetrigidae. Deux axes assez contradictoires se dégagent en fonction des auteurs.
(1) Un premier groupe d’auteurs a mis en évidence une communication complexe basée sur des signaux vibratoires et visuels (de 5 types). Selon eux, il s’agit d’une signature spécifique forte, permettant le rapprochement des partenaires d’une même espèce.
(2) D’autres auteurs mettent en évi-dence une grande confusion sexuelle chez les Tetrix, ne permettant pas une distinction interspécifique, invalidant le postulat précédant. En outre, cette confusion sexuelle nécessite la mise en place de mécanismes d’isolement pour limi-ter une trop grande perte d’énergie reproductive. Cette dernière théorie semble s’appliquer dans le cas précis de Tetrix kraussi et de Tetrix bipunctata, où une ségrégation spatiale est constatée quand les deux taxons se trouvent en sympa-trie. Ce constat conforte le rang spécifique de ces deux taxons, dont la divergence génétique est probablement récente et peut-être toujours en cours.